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ASA et la résilience des victimes d’incidents de protection dans la Basse Kotto

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La crise humanitaire que connait la République de Centrafrique, est fortement liée à la dégradation de l’environnement sécuritaire. Les affrontements entre groupes armés entrainent des déplacements massifs des populations, qui abandonnent tout pendant la fuite et se retrouvent dans un contexte de vulnérabilité sans précédent. Dans la préfecture de la Basse-Kotto, les affrontements entre groupes armés dont les plus intenses ont été enregistrés en 2018, ont entrainé le déplacement de 53,089 personnes. Jusqu’à présent, l’environnement sécuritaire reste toujours fragile.

Le monitoring de protection mené par Afrique Secours et Assistance (ASA) avec les fonds humanitaires dans la région de la Basse-Kotto depuis fin 2019, a permis de rapporter 438 incidents de protection, dont les principaux sont à 62% les cas de violence basées sur le genre, et 10% les cas de violation du droit à la vie et à l’intégrité physique. Les femmes et les enfants sont les personnes les plus touchées par les incidents, et l’impact de la précarité de l’environnement de protection, se fait ressentir sur le plan social en raison du rôle important que joue la femme dans la société.

Dame Sylvie[1], est une ancienne commerçante, aujourd’hui déplacée, elle est originaire de la localité de Mboma. Elle a trouvé refuge à Mobaye dans une famille d’accueil après avoir été victime, elle et sa famille, de graves violations des droits de l’homme dans sa localité d’origine en 2018. Sa vie a basculé depuis lors, et sa vulnérabilité est devenue extrême. Aujourd’hui âgée de 47 ans, elle se souvient encore des atrocités qu’elle a vécues. « Mes trois garçons ont été tués sous mes yeux par des hommes en arme alors que nous fuyions Mboma au moment des affrontements, et j’ai par la suite été torturée, rouée de coup, avant d’être laissée pour morte. Je garde toujours les séquelles sur mon corps » explique Dame Sylvie. Elle présentait un traumatisme émotionnel apparent important lorsqu’elle a rencontré pour la première fois l’agent psychosocial, sur orientation des moniteurs de protection. Son traumatisme la rendait incapable de se prendre en main, et cette situation a même entrainé son rejet par sa famille d’accueil environ deux semaines avant qu’elle ne soit prise en charge par ASA.

Dame Sylvie a bénéficié des séances d’écoute et de conseil au sein du centre d’écoute rendu fonctionnel par l’organisation dans la localité de Mobaye depuis fin février 2020. Elle a, en plus, bénéficié d’un appui monétaire pour lui permettre de mener une petite activité commerciale afin de devenir plus résiliente. Elle a donc obtenu une place d’étalage au marché de Mobaye pour son commerce de denrées alimentaires, et ses revenus lui permettent aujourd’hui de couvrir ses besoins de première nécessité. Le soutien psychosocial reçu et son occupation due à son activité commerciale lui ont redonné goût à la vie.

A l’instar des services octroyés à Dame Sylvie, ce sont 285 femmes/filles victimes de violation des droits de l’homme ou à risques, qui bénéficient des services du centre d’écoute. Elles font objet d’écoutes, de documentations, de conseils, de suivis et de référencements selon la spécificité de leur cas. Elles sont informées sur les services existant au plan local à travers divers autres partenaires et services étatiques, et sont orientées selon leurs souhaits tout en respectant leur dignité et la confidentialité.

230 femmes et filles vulnérables et à risques de Violence Basées sur le Genre (VBG) ont déjà bénéficié de kits de dignité. 5 712 personnes ont été sensibilisées sur le respect des droits humains, et 3 801 personnes ont directement été touchées par des sensibilisations sur les risques de VBG dans la région.

Afin d’optimiser la remontée des informations sur les violations des droits de l’homme dans la Basse-Kotto, ASA a mis en place huit mécanismes de protection dont le fonctionnement est essentiellement basé sur les comités de protection et comités VBG mis en place et redynamisés. Ils permettent d’alimenter les plaidoyers, à travers les rapports d’analyse de la situation de protection qui sont partagés à la communauté humanitaire mensuellement.

[1] Nom anonyme, afin de ne pas exposer la victime.